jeudi 20 décembre 2007

Plaidoyers

La Nécessité d’une redynamisation des Partis.

Cette tache me semble importante si nous voulons consolider nos acquis démocratiques. Notre processus démocratique n’est pas encore irréversible. La preuve en a été faite le 27 Janvier 1996, en 2000-2001 par les mutineries dans les casernes de l’armée. La rébellion actuelle n’est autre chose qu’une remise en cause de la démocratie. On évitera ces travers, cette mésaventure lorsque les partis et associations composant la société civile sont dynamiques. La qualité de la gestion du pouvoir par un parti est aussi fonction de la qualité de ces membres, de ces cadres. Le chef a beau être un chef de génie, s’il n’a autour de lui que des rapaces prêts à le menacer chaque fois que leurs intérêts mesquins sont en cause, s’il manque avec lui des citoyens acquis à la cause, la nation ne profitera pas de ses qualités. Le charisme ne suffira donc pas. Il faut des citoyens et des militants convaincus de l’efficacité de l’action politique pour un meilleur destin collectif. Les individualités sont importantes mais ne sauraient suffire à transformer durablement une nation.
C’est l’échec des organisations de la société civile, des partis en particulier, qui rend possible les coups d’Etat, la corruption, les abus de pouvoir de toutes sortes. C’est le manque du dynamisme des partis qui fausse le renouvellement de la classe politique, qui permet la transmission du pouvoir par des modes non démocratiques dictés par des sénilités, des mafias et des opportunistes juchés au sommet de l’Etat...

Le « fondateurisme », la personnalisation, ennemis de la modernité politique

Je le disais dans mon précédent message, ce sont les partis qui m’intéressent sur ce sujet. Les associations sont secondaires dans la mesure où elles n’ont pas les mêmes missions que les partis politiques. Elles participent certes à la vie de nation, elles ont des missions importantes de contrôle du fonctionnement des pouvoirs publics, de défenses des intérêts de la société et de leurs membres, elles contribuent à la formation/transformation des citoyens qu’elles insèrent dans de cadres d’actions collectives sans lesquelles les changements se feraient attendre. Dans leur grande majorité, ces associations fonctionnent comme des structures privées. Les « fondateurs » s’y arrogent tous les pouvoirs. Elles fonctionnent à l’image de certains partis politiques. On dirait même que leur fonctionnement est plus personnalisé que celui des partis politiques.
En effet, ne serait-ce que pour se conformer à la loi, la plupart des partis tiennent leurs congrès statutaires ; ce n’est pas le cas de la plupart des associations et ONG.
Les syndicats me semblent être des regroupements dont on pourrait s’inspirer de l’expérience pour corriger les lacunes des associations et des partis.
Revenons donc aux partis.
Je n’ai pas l’intention de parler de tous les partis. Quoiqu’on fasse, certains partis resteront des propriétés individuelles ou familiales qu’ils ont toujours été. Toute tentative de leur transformation de l’intérieur leur serait fatale. Ils mouront d’ailleurs avec leurs leaders, ou les familles qui les ont créés. Et c’est tant mieux.
Mes propos seront axés sur les partis politiques créés par la volonté collective des citoyens libres. Des partis qui ont non seulement l’ambition naturelle de prendre le pouvoir, mais aussi d’utiliser ce pouvoir en vue de construire une société conforme aux idéaux qu’ils professent. Des partis modernes qui, à cause de notre inexpérience de la vie démocratique, de la mentalité ambiante (opportunisme, corruption et clientélisme, féodalisme, etc.), des manques des ressources propres pour assurer leur fonctionnement, tendent à se privatiser. Cette tendance à la « privatisation », à la personnalisation rampante qui rend superflue la nécessité d’un fonctionnement rationnel n’est pas le propre de quelques partis. Elle est générale. Plus ou moins prononcée selon les partis et la personnalité des leaders.
Pour être « membre fondateur » du PNDS (si cette expression a un sens au PNDS), pour avoir été dirigeant du SNEN et de l’USTN, pour avoir été l'un des premiers militants et premier responsable du PNDS à Tahoua, pour avoir été un des dirigeants du CCLD, de l’AFC et enfin du FRDD, j’ai participé à la vie des partis ; j’ai professé des idéaux ; j’ai participé à initier un minimum de fonctionnement propre à ce genre de structures. J’ai eu l’occasion d’observer des associations et d’autres partis. Ce ne serait donc pas une prétention de ma part de parler de ce sujet. J’ai un minimum d’expérience sur le sujet. Je ne me sens pas moins qualifié que la plupart de ceux qui en parlent…
Certaines tares dans le fonctionnement des partis sont communes à tous les partis, même si les militants s’en accommodent plus ou moins aisément selon les partis et leur histoire.

Je balaierai d’abord devant notre porte

Je parlerai donc du PNDS. Ce serait ma modeste contribution, entant que militant, à la correction de ce qui me semble être des errements. Pour que ce parti reste sur les principes et le projet de société qui étaient à la base de sa creation.
Il me semble simplement essentiel, vital, que les militants et cadres de ce parti engagent des réflexions autour de nos idéaux, de nos alliances politiques et de nos méthodes de travail. Ce travail me semble avoir été délaissé au profit d’un autre non moins important cependant: celui de la stratégie pour la prise du pouvoir. Or, ces 2 réflexions devraient aller de paire.
En tant que Parti Socialiste, nous devrions engager des réflexions sur ce concept général et vague pour qui aspire à l’action de transformation sociale.
Sans sacrifier à la nécessité d’un programme de campagne, chose plus de mode qu’autre chose dans notre pays, ce programme de gouvernement s’inspirerait de cette réflexion générale dont nous ne ferions plus l’économie. Cette réflexion est d’autant plus importante que nos cadres la réclament. Certains commencent même à douter de notre volonté à poursuivre les idéaux de nos débuts.

Nous étions une famille, nous devrons le rester

Or ces cadres constituent l’épine dorsale du parti. La plupart de nos cadres ne sont venus au parti que sur la base de son "Manifeste", de l’analyse que nous faisions de la situation nationale, des discussions que nous avions eues ensemble, des épreuves que nous avions vécues ensemble, la confiance qui s’était nouée dans les risques que nous prenions ensemble. Nous avions fait l’USN. Nous avions fait le SNEN et l’USTN à laquelle nous voulions imprimer une ligne revendicative et politique sous les régimes de dictature. Nous avions fait la clandestinité ensemble. Nous avions initié le mouvement de la démocratisation…Le PNDS est une famille pour beaucoup d’entre nous. C’est là que nous avions continué à vivre notre vie sociale. Nous étions camarades, amis et parents.
On comprendra aisément pourquoi, malgré les épreuves des 15 dernières années, malgré une traversée de désert qui n’en finit pas, nos cadres sont restés dans leur parti.
Oui, à la différence des autres partis dont les militants restent des incorrigibles nomades, les militants du PNDS ne désertent pas. La raison de cette fidélité est dans notre confiance mutuelle, notre sens du devoir, de la dignité, dans l’espoir de la réalisation de l’idéal commun. La raison est notre intégrité.
Il faudrait donc préserver cette intégrité par la consolidation de ce pourquoi nous nous étions mis ensemble. Il faut préserver ce qui fait notre fierté que d’aucuns considèrent comme de l’arrogance.
Mais ces valeurs professées (la solidarité, la démocratie, la justice, la citoyenneté et la république, l’honneur et la dignité, le don de soi, l’intégrité) suffiraient-elles à faire de nous un parti qui gouvernerait autrement et efficacement? Non. Il faudrait sans cesse mettre un contenu précis et concret dans ces notions si nous ne voudrions pas décevoir ; si nous voudrions gouverner différemment et assurer le salut de notre peuple; si nous voudrions garder notre identité sans cesse en construction. Il faut que ces valeurs qui sont, souvent, simplement professées se traduisent dans le programme et l’action économique, sociale et politique. Sinon, nous nous contenterions toujours ce que nous diront les experts et leurs sponsors du FMI et de la Banque mondiale. Nous nous réduirions à des « Programmes Spéciaux », « PAS », « PASR » ou des « PSRP » inspirés d’on ne sait quelle théorie du développement, ou de quelle motivation stratégique.
A persister dans la seule profession de foi, on ne créerait pas ce parti socialiste conscient de l’être, prêt à s’assumer comme tel, un parti socialiste conscient de son option et des difficultés de sa mise en œuvre.
En d’autres termes : je ne doute pas de notre orientation idéologique et politique ; je ne doute pas du travail de réflexion , d’innovation que font certains militants et leaders ; je ne doute pas de l’engagement sincère de certains de nos dirigeants et militants ; je ne sous-estime pas l’impact de nos séances de travail, (longues et ennuyeuses pour la plupart des dirigeants des autres partis étrangers au principe de fonctionnement démocratique) ; je n'ignore pas le travail de nos secrétariats qui prennent sans cesse des notes aux réunions ; etc. Je plaide pour un débat plus formalisé autour de nos programmes, de nos actions et décisions en rapport avec les principes cardinaux qui nous avaient réunis et qui continuent de forger la discipline et la fidélité qui sont les nôtres.
Nos militants paient tous les jours des prix forts pour cette discipline et cette fidélité. Ce serait reconnaître, valoriser et pérenniser cette discipline et cette fidélité que la plupart des politiciens et citoyens ne comprennent pas. Cette façon "de faire de la politique" comme la religion; cette "ridigité qu'ils confondent à un trait de caractère plutôt qu’à un respect des principes sans lesquels beaucoup de militants PNDS assimileraient la politique à un jeu criminel, à une grosse escroquerie.

Retour à la « Case » de notre naissance et de notre initiation

Pour le moment, je ne vois difficilement où se forme cette identité indispensable. Beaucoup de nos structures de base ne se réunissent que pour renouveler leurs bureaux, pour faire des programmes de « sortie » ou pour organiser un « accueil », sinon c’est pour designer des délégués pour telle ou telle manifestation. En général, elles ne tiennent plus leurs PV de réunions, ne motivent pas souvent leurs décisions quand elles délibèrent ; elles sont quelques fois inféodées à des personnalités « extérieures » qui leur donnent des instructions. Même nos congrès sont devenus, certes avec raison, des occasions de réjouissance. Les contributions des fédérations y sont à peine relues et synthétisés pour figurer dans un engagement politique qui nous servirait de ligne directrice « entre 2 congrès ». Les instances intermédiaires ne se réunissent plus. Elles auraient été un lieu idéal pour les débats politiques et idéologiques constructifs, des débats qui ennuieraient s’ils se tenaient dans un congrès ou un Conseil Fédéral. Certes, nous avions des commissions qui s’assignent de telles missions. Mais elles ont la tare de ne pas être permanente, d’être circonstancielle.
Seul les discours du Président du Parti et les interventions circonstanciels de certains cadres servent de referant. Ce n’est pas suffisant quand bien même ses discours et ces interventions souvent très denses, rencontrent l'adhésion des militants.
Oui, les « points focaux » (structure regroupant des cadres par qualification professionnelle) sont d’un apport certain. Mais il aurait fallu populariser leurs débats. Il aurait fallu savoir sur quelles directives idéologiques et politiques ils élaborent leurs programmes sectoriels.
Ces questions et bien d’autres appellent à la création des cadres d’échanges politiques. Elles appellent à la réhabilitation d’une pratique que nous avions oubliée : les conférences-débats.
Les « Talk Show » actuels, à l’initiative des seuls medias, tendent à remplacer les débats idéologiques et politiques. Ce qui est dommageable à la formation de la citoyenneté.
La nécessité de la création ou de la réhabilitation des cadres d’éclosion de cette vie politique et idéologique est indiscutable.
Seule une confrontation de nos idées, seul un renouvellement/réappropriation permanente de nos idéaux garantirait notre parti contre les opportunistes qui le prennent d’assaut chaque fois que le pouvoir d’Etat vient à notre portée.
Bien des citoyens viennent à nous par respect pour notre engagement, pour les valeurs que nous professons. Ces citoyens ont besoin d’être encadrés pour assurer leur formation, eux qui viennent des structures différentes. Ils contribueront certes à la victoire. Mais pour que cette victoire soit celle de nos idéaux, il faudrait que ce soit notre parti qui "prenne en charge" ces nouveeaux militants et non inversement.
Pour ce faire, la confiance au travail des structures doit être promue. Un fonctionnement rationnel des structures est le seul garant de la stabilité de notre parti, de sa victoire électorale et de transformation de la société.
Parallèlement aux organes de direction désormais trop lourds et truffés des personnalités qui voudraient avoir « l’honneur » d’y figurer et qui faussent nos décisions et nos stratégies, d’autres organes qui regrouperaient des cadres conscients pourraient être créés pour prendre en charge la question de la formation politique et idéologique. Ce ne serait pas une pratique « vieux jeu ». Il y’a bien des secrétariats dans le bureau National et les bureaux régionaux autour desquels cette activité pourrait être promue.
La formation des militants est la voie royale qui conduit l’éclosion de l’Initiative de la base, qui rendrait possible la responsabilisation des cadres. Elle assure l’autocontrôle et la pérennité de la structure dans ses ambitions voulues. Des usurpateurs auront beau prendre la citadelle d’assaut, ils seront repoussés, ou se soumettront à l’ordre patiemment et consciemment établi.
La vigilance des cadres et des responsables de notre parti, un fonctionnement responsable de nos structures elles-mêmes acquises à nos idéaux nous auraient sauvé, par exemple, de la catastrophe de nous faire représenter à l’Assemblée par le Groupe Parlementaire actuel. Une vraie catastrophe dans laquelle la plupart de nos militants ne se retrouvent pas. Une piètre « représentation » que même nos adversaires nous reprochent !

Les Alliances électorales.

A ce jour, aucun parti politique n’a pu prendre le pouvoir au Niger sans alliance avec d’autres partis. Il en sera ainsi pour des années encore au regard de l’implosion qui menace le MNSD, lui qui aura ses 10 ans aux commandes en 2009. Une division quasi certaine si ses adversaires viennent à disqualifier Hama, le présidentiable naturel.
Les alliances seront donc nécessaires, indispensables pour qui aspire à prendre le pouvoir aux élections de 2009 au Niger.
La question importante en mon sens est : quelle Alliance pour le PNDS en 2009?
Les spéculations actuelles m’importent très peu. Celles que j’entends le plus souvent viennent des milieux étrangers à nos préoccupations : nos préoccupations de réussir notre gestion du pouvoir au profit du peuple du Niger. Les ragots, les supputations actuels sur la question sont dictés, comme d’habitude à l’approche des élections, par la tendance du sensationnel de certains journaux, le « prophétisme » de certains « politologues » qui aimeraient dire un jour : « je l’avais dit » même si ces « experts » changent de « prévisions » plus souvent qu’ils ne changent leur carnet de notes.
Mon point n’est pas la seule prise de pouvoir. Mais l’usage que nous ferions de ce pouvoir pris à plusieurs. Or, notre objectif au PNDS, c’est de fonder une société solidaire, réhabiliter l’état dans sa mission de garant de la justice sociale, de la redistribution juste, des libertés individuelles et collectives, d’arbitre et de protecteur des intérêts des masses et de la nation ; réhabiliter l’administration et les institutions pour les mettre au service exclusif des citoyens desquels elles tirent leur légitimité ; en finir, chemin faisant, avec la prédation et la mauvaise gestion endémiques ; promouvoir la modernité, l’initiative et le dynamisme dans le secteur public et privé.
Cet objectif ne saurait être atteint sans une alliance conçue à cette fin. Une alliance qui inscrirait son programme de gouvernement dans cette perspective, qui combattrait la corruption et l’incompétence d’où qu’elles viennent.
Lorsque nous garderons cet objectif dans notre esprit, il est clair que nous ne saurions nous tromper d’alliés potentiels ! Nos détracteurs et certains militants ne manqueront pas d’en conclure que cet allié est aujourd’hui introuvable au Niger ; en 10 ans de pouvoir, la plupart des partis s’étant illustrés dans la mauvaise gestion, la corruption et l’option libérale irresponsable et archaïque.
Il y’a une part de vérité dans cette affirmation qui confonde les individualités à l’organisation qu’est le parti.
On ne saurait confondre un parti dans ces objectifs affichés, dans son idéal aux turpitudes de certains de ces militants, premiers responsables soient-ils.
Certes, un parti c’est aussi ces militants et leaders, des hommes et femmes sans lesquels le parti n’est qu’une Idée, un programme inefficace parce que sans les outils de sa mise en oeuvre.
Mais on conviendra qu’une organisation peut guérir du mal de sa direction pourvu que le contexte change, ou qu’une dynamique interne provoque le renouvellement de ses animateurs au sommet.
A suivre.

samedi 15 décembre 2007

Mes Points

Au nombre des sujets que je voudrais aborder pour le moment, figurent le fonctionnement des partis (mon parti, le PNDS en particulier), la corruption dans l’administration Nigérienne, la rébellion au Niger et au Mali.
Ce n’est pas parce que je "fais de la politique" que je m’intéresserai au fonctionnement des partis. Je m’y intéresse parce que ce sont les outils de la prise et de l’exercice de pouvoir. Quand cet outil (le Parti politique) se détériore c’est tout le reste qui en pâtit. Quand les partis et la société civile ne fonctionnent plus bien, c’est toute la vie politique qui s’en ressent.

Lorsque ces partis prennent le pouvoir (ils peuvent le prendre quand bien même ils seraient désorganisés), le résultat de la gestion ne saurait être à la hauteur des espérances.
Voila pourquoi je considère une réflexion sur le fonctionnement des partis comme chose nécessaire, indispensable. Je vais donc critiquer les partis parce que je connais leur importance, parce qu’il n’y pas de démocratie politique sans les partis. Je ne saurais etre comme ces citoyens qui, de bonne foi ou non, souhaitent la mort des partis ; ceux-là qui s’abonnent aux « indépendants ».
Pour moi, le parti est un organe mis à la disposition des citoyens pour pour leur salut public. Cet outil doit être sain pour ne pas corrompre les citoyens, la nation. Il doit être constamment affiné pour continuer d’être efficace, pour inspirer la confiance. Je parle des partis plus que des autres organisations de la société civile, parce que ces organisations ont souvent des objectifs circonscrits, elles ont une envergure plus ou moins restreinte.
Pour ce qui est de la corruption, personne ne doute de l’importance du sujet. Personne ne doute des méfaits de cette pratique dans notre vie, dans la vie de nos États. Tout le monde la condamne ; tout le monde dit souhaiter son éradication. Mais beaucoup de citoyens s’en adonnent à cœur joie. Ils prétendent que c’est le seul choix qui leur est donné dans le système. Cela n’excuse pas. Je les comprends cependant. Je comprends un père forcé de payer pour que son enfant ait son diplôme. Je comprends le paysan qui paie le chef de canton ou le juge pour récupérer son champ que les témoignages ne suffisent pas à lui restituer. Je comprends l’épouse qui paie le chef de canton ou le juge pour se séparer de l’époux bourreau, ou pour pouvoir vivre avec ses enfants qui lui seront retirés à coup sûr si elle ne paie pas plus que son ex. Je comprends l’éleveur qui paie le juge ou le chef de canton pour qu’on ne lui prenne pas ses animaux pour un dégât champêtre contestable. Toutes ces victimes de la corruption savent qu’ils auront un mauvais jugement s’ils ne faisaient pas « un effort »; au meilleur des cas, ils iront d'un tribunal à autre. Le commerçant qui paie le douanier ou l’agent des impôts pour ne pas avoir à payer ses taxes pour rester concurrentiels dans un environnement de passe-droit. Je comprends le salarié qui paie l'agent des Finances pour débloquer un salaire qui restera "dans le circuit" sans ce geste. Je comprends même le cadre technique qui accepte des compromissions pour obtenir la promotion qu'il merite laquelle sans quoi, ira aux « collègue moins que soi ». Personne ne voudrait passer son temps à faire des mots croisés...Même un cadre peut faillir.
Dans un tel climat, combattre la corruption est problématique et perilleux.

La corruption devenue un mal acceptable. On s'y est fait. Cercle vicieux. Tout le monde y passe comme corrompu ou corrupteur, ou les deux.Même les partis politiques n'en sont pas épargnés: on corromp les électeurs. On corromp pour contracter les alliances électorales...Pire, tout effort de lutte contre la corruption est dénoncé comme un règlement de compte politique.
Je parlerai de la rébellion parce que, plus que tout autre mal, elle est une menace mortelle pour la nation ; elle compromet tout effort de développement ; elle tue des citoyens et installe la terreur et la haine dans leurs coeurs. Des citoyens du même pays qui se tuent pour des raisons plus ou moins farfelues, plus ou moins justes. La rébellion est devenue un problème récurrent. Pourquoi la rébellion naît-elle toujours dans cette partie de notre territoire ? Y’a-t-il un mal être qui frapperait essentiellement les jeunes Touaregs ?

Il ne suffit pas d’être désespéré pour passer de la contestation pacifique à la lutte armée. Qu’est-ce qui pousse alors les jeunes Touaregs à la rébellion armée ? Pourquoi ce particularisme chez certains jeunes Touaregs ? A lire, ou à écouter certains d’entre eux, on viendrait à la conclusion qu’ils ne se considèrent pas comme des Nigériens à part entière, ils seraient jaloux de leur mode de vie traditionnel irremediablement menacé, ils demanderaient de profiter des richesses des sous-sols de leurs regions...Cependant, le caractère ethnique de cette rebellion cache une autre réalité que les philanthropes ne connaissent pas; mais que les rebelles feignent d'ignorer: la plupart des Touaregs ne sont plus au Nord. Ils sont au Sud où ils partagent le quotidien de leurs autres frères. Le Nord n'est plus "Touareg" désormais.
Sur cette question, comme sur les autres, je n’ai pas la prétention de dire la « vérité ». Je réfléchis et invite à la réflexion. J’affirme certes. J’affirme avec la force de mes croyances et convictions.

dimanche 11 novembre 2007

Mes Raisons

S’il est vraiment nécessaire de justifier la création de ce genre d’espace (ce blog), je ne saurais donner des raisons crédibles sinon la mode et le besoin de s’ouvrir, le besoin de « thêser » comme dit le Camarade Mai Abdou Mai dit Bayi.
Je voudrais « partager » quelques « expériences » de la vie avec mes compatriotes, avec les amis… ;
Je voudrais donner des points de vue personnels sur la vie de mon pays ;
Sachant que je serai « lu » par tous ceux que le hasard conduira sur ce blog, je me propose de voir par moi-même quelles réflexions je serai capable d’assumer. Comme on le sait, il est difficile de partager certaines réflexions ; tant pour les risques, nombreux, qu’une telle entreprise fait courir pour son auteur parlant des autres et de la vie publique, que pour le travail nécessaire de clarification que nécessite une telle « publication ».
Je ne sais pas si j’en serai capable.
Pourtant depuis mon jeune âge, j’ai pris l’habitude de parler des questions générales, de prendre la parole dans des assemblées de mes camarades.
Je crois que c’est mon jeune maître, Mahamane Dan Galadima, qui le premier, m’avait montré que l’instruction me donnait quelques responsabilités. J’étais le premier élève de mon village, sinon le premier élève de ma petite zone rurale. Les misères de la famine de 1974 au Niger, (plus généralement dans les pays du Sahel), était un des sujets sur lequel notre jeune maître ne cessait de rouspéter. Nous l’écoutions sans savoir que quelqu’un pourrait avoir une quelconque responsabilité dans ce drame (à part Dieu, bien entendu). Nous ne pensions pas que les populations sans ressources puissent être secourues sinon par la solidarité traditionnelle entre familles.
Je ne saurais dire comment notre école obtint le privilège de recevoir des « vivres » pendant que les chefs de villages étaient convoqués à Kornaka ou à Ajekoriya pour récupérer des aides. A l’école, des américaines et des agents d’ « Animation » de Dakoro nous servaient de la bouillie enrichie pour atténuer les effets de la malnutrition dont tous les élèves étaient victimes. Nos parents devraient se contenter de quelques kilogrammes de lait américain qu’ils allaient chercher à des dizaines de kilomètres à Kornaka ou Ajekoriya. C’est avec le coup d’état de Kountché que les vivres seront variés, la quantité aussi changea.
Notre maître, toujours frustré, avait certainement maintes fois fait remarqué ce changement dans l’octroi d’aide « aux éprouvés», comme on disait à l’époque.
Quand j’obtins ma bourse pour l’entrée en sixième, les disettes sévissaient toujours.
Nous rentrions en « ville » (Dakoro) et faisions l’expérience des révoltes scolaires.
Pêle-mêle, les plus âgés des élèves nous parlaient de la lutte des scolaires pour les droits du peuple et les droits de ses fils, les scolaires. Nous verrons d’ailleurs des élèves du Lycée de Maradi victimes des répressions policières, conséquences des mouvements qu’ils organisaient.
Même s’il nous donnait quelques fois des touques de biscuit américain avarié, Yahaya Moussa, le directeur du CEG de Dakoro, faisait régner la terreur par les punitions qu’il infligeait aux élèves. Deux ans plus tard, le CEG de Dakoro connaîtra sa grande grève suivie de casse au domicile de Yahaya Moussa, le directeur. Tandja, à l’époque préfet de Maradi, réprimera sévèrement ce mouvement.
Je vus des élèves qui gardèrent le lit pendant un an à cause des coups reçus. L’inspecteur (ou l’officier de police) Saidou Dan Haoua faisait partie du lot. Le président de l’Association des Elèves du Collège de Dakoro Mamane Inti subit le même sort.
Je ne m’expliquais pas un tel châtiment. Je connaissais les hauts faits de l’autorité. Mais c’était sur des paysans. Jamais sur des « instruits », mis à part les élèves du Lycée de Maradi que je ne connaissais pas vraiment.
Quand le nouveau directeur Acosta François me sauva d’une exclusion certaine pour raison d’indiscipline, je finissais de m’installer dans la rebellion. J’avais acquis la conviction que l’autorité ne nous aimait pas puisqu’elle pouvait prononcer mon exclusion scolaire pour un rien, elle pouvait battre à mort des petits enfants que nous étions pour des actes inconsidérés que seul notre jeune age rendait possible.
Lorsque je fis mon entrée en Seconde du Lycée de Zinder, je n’hésitai pas à intégrer le cercle des élèves "politiques". Je lisais tout ce que les Mamane Tarno, feu Gomna, Zika, plus tard Feu Ayouba Antchan nous proposaient à lire.
Mes souvenirs retiennent cette période comme la période de ma « prise de parole » en A.G., (en public). Depuis lors je n’avais cessé de le faire. Très actif, je fus membre du C.E. (comité exécutif de l’union des scolaires) de relève. Pendant la grève de 1982 je jouai un rôle plus marqué. C’est donc tout naturellement que je serai « Meneur » en 1982-1983 quand le CMS supprimera le régime d’internat au Lycée. Je connus les menaces des autorités administratives, celles des « parents » d’élèves (en réalité membres du mouvement Samaria à la solde du régime CMS), et même le courroux du redouté Feu Sarki Bouzou (Chef de Province de Maradi) qui, un jour, ne put s’empêcher de nous souhaiter le vilain avenir de "couper la paille"!
Toutes ces autorités prenaient les élèves pour des ingrats auxquels l’Etat offrait du macaroni dont ne pourraient en rêver leurs géniteurs ; à l’époque c’était un luxe alimentaire…
A cette période je participais tout naturellement aux négociations, ou même les conduisais. Je fus exclu de l’école pour cette raison…L'ex deputé Sabo Saidou, Feu le syndicaliste Sahabi Barmou m'avaient marqué leur sympathie...
Je viendrai plus tard à l’Université. Sans bourse jusqu’en Maîtrise à Dakar. C’était Feu Zeilani Jackou qui s’était personnellement déplacé de Loga pour venir m’inscrire à l’Université de Niamey; ce n’était pas évident à l’époque puisque les Chaibou Neino, Feu Racha, Issa Djibo, etc. n’avaient pas pu s’inscrire malgré leur Bac obtenu l’année précédente. Nous allions tous nous retrouver, tous les pestiférés de 1983 dans une grande salle du rez-de-chaussée du Bâtiment Sanki.
L’USN était interdite par le régime CMS. La plupart de ses dirigeants forcés à l’exile au Burkina Faso. Mais c’est le hasard qui me conduisit à Dakar pour la licence. Je me retrouvais sans bourse, sans qu’aucune raison le justifie puisque tous mes camarades inscrits au même cycle avaient désormais la bourse pleine.
Les camarades que j’avais trouvés à Dakar (Kader Lawel, Bangana, Abarchi, Chanono, Abdou Adam, etc.) me permirent de ne pas y penser par leur solidarité. Je vécus d’ailleurs de cette façon pendant mes 2 ans à l’Université de Niamey.
Je n’étais pas dépaysé à Dakar à cause des libertés publiques dont on pourrait jouir, de l’unité des scolaires Nigériens, de la vie intellectuelle, politique.
L’année de mon arrivée, je fus élu Secrétaire Général de l’USND (Union des Scolaires Nigériens, section de Dakar). L’année suivante, mes collègues me feront l’honneur de m’élire Président de la même Association. Je participais à la vie des petits groupes d’Etudes Marxistes avant de me faire coopter (officiellement) dans un groupe politique clandestin Nigérien.
C’est fort de mon expérience dans le mouvement estudiantin que je proposais à l’époque la création de l’ « Union Démocratique des Etudiants Nigériens » (l’UDEN à la place de l’USN refusée par le pouvoir). Cette idée fut combattue puisqu’elle envisageait la séparation Elèves (primaire, secondaire) et Etudiants (Université et écoles supérieures).
Contre l’avis du Camarade Bazoum Mohamed, je rentrais au pays après ma maîtrise. Je voulais travailler. Sanoussi Jackou me proposa de le suivre à l’IRSH, je crois. Je le trouvais très paternaliste, féodal et versé dans la religion pour le suivre et gâcher les bons rapports que nous avions à l’époque.
Je remplaçai donc Bazoum au Lycée de Tahoua, comme professeur de Philosophie.
C’était Sorka Mounkaila, (enseignant, syndicaliste proche de Bazoum) qui m’accueillit dans le milieu. Je donnais des coups de mains au SNEN malgré l’interdiction qui m’était faite en tant que « Civicard ». Plus tard, je donnerai des conférences publiques. Il faut dire que la lutte pour la démocratie était engagée. Le régime Ali Saibou était chancelant.
Membre fondateur du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme, désormais Secrétaire Général de la Fédération de Tahoua, je quittai le bureau de l’USTN et du SNEN pour éviter le cumul et me consacrer à la politique, la seule chose vers laquelle devait me conduire la lutte syndicale. Avec mes amis de Tahoua (Sorka, Racha, Mahamadou Malan Moussa, Abdou Lawan, Tambari, Nabagaye, Ali Bety, etc. et l'appui des camarades Issoufou Mahamadou, Kadi Abdoulaye...nous installions les structures du parti dans la region de Tahoua.
La nécessaire lutte syndicale doit, ne serait-ce qu’à terme, s’accompagner d’une conscience politique. La conscience politique conduit à l’engagement politique. C’est comme ça que je voyais les choses.
Je partis donc pour la politique. Depuis lors, j’y suis resté. Je ne répugne toujours pas à prendre la parole.
Deux fois j’étais candidat à un poste électif. La première fois, c’était les élections locales organisées par le régime Baré, un scrutin qui sera perturbé et finalement annulé.
La deuxième fois, c’est à l’occasion des élections législatives de 2004…
J’avais participé aux luttes de FRDD au temps du régime Baré. Je connus même la prison de Maradi pour 3 mois avant d’être déporté à Niamey par des Paras pour quelques jours. Mes compagnons d’infortune étaient entre autres les gouverneurs Zeiti Maiga et Yahaya Yandanka du MNSD, les députés Salissou Watsi, Alassane Ali du CDS, l’ex Maire de Maradi Abdou Liman, le Commerçant Abdou Manzo, Salissou Leger, Noura Abdou Waziri, etc.
Ma carrière d’enseignant connut donc des interruptions : Maire de l’AFC pendant 3 ans, depuis 2001 je vis à l’extérieur.
Mais je suis suffisamment attaché à mon pays que je visite regulierement qu’il y’a encore des gens qui pensent que je vis encore au Niger.
J’ouvre donc ce Blog pour parler de mon pays, de ses réalités quotidiennes. Je parlerai, nul besoin de le dire, à partir de mon expérience, de mes rêves pour ce pays. Je parlerai de l’actualité qui retiendra mon attention en Afrique et dans le monde. Je parlerai des questions graves et légères. Je prends la vie au sérieux parce que, absurde soit-elle, le bonheur est un état auquel nous aspirons tous avant le retour dans l’inconnu ou dans le néant ; l’injustice ou le sentiment d’injustice nuit au sentiment de bonheur, à l’équilibre de la personne.
Participant de l’absurdité de la vie, aspirant au bonheur malgré ou à cause de cette absurdité de la vie, j’aime blaguer, me moquer de moi-même et de tout.